Le capitalisme a déjà connu de nombreuses
crises mais il s’est à chaque fois relevé. Et, sans prédire sa disparition
prochaine Jeremy Rifkin nous annonce qu’il va devoir se spécialiser en
partageant le gâteau avec une autre économie, l’économie collaborative ou les
« communaux collaboratifs (en anglais « collaborative
commons »). Nous reviendrons sur ce nouveau type d’organisation économique
dans un prochain chapitre.
La logique capitalistique est d’améliorer
la productivité afin de réduire les coûts de production et ainsi d’engendrer
toujours plus de profits. La réussite est totale, la domination des marchés est
incontestée, la fin de la pénurie est inéluctable et la mutation technologique
tend vers un coût marginal zéro. Celui-ci est le coût de production d’un objet
ou d’un service additionnel une fois les coûts fixes absorbés. Les capitalistes
ne vont plus pouvoir, comme ils l’ont si bien fait pendant deux siècles,
paralyser le progrès technique afin de reconstituer leurs marges et maintenir
un chômage salutaire. Si le coût marginal est proche de zéro, les entreprises
qui se rémunèrent essentiellement sur celui-ci voient leurs profits
disparaître, interdisant alors toute rémunération des actionnaires et tout
investissement. Les plus grands théoriciens économistes avaient prévu cette fin
en raison de ses contradictions originelles. Toutefois, grâce à sa
concentration, le capitalisme va résister pour sa survie en devenant un
capitalisme de niche. Nous allons traverser des zones de turbulence, surtout
qu’il va nous falloir trouver des moyens compensateurs pour investir, condition
indispensable pour innover. Il est évident que cet argument va être utilisé
pour faire admettre aux citoyens l’impérieuse nécessité de maintenir une
économie capitaliste.
Quelque soit la société que nous allons
nous donner, les investissements qu’ils soient immatériels (formation,
recherche, éducation, accompagnement au changement) ou matériels (énergies
renouvelables, rénovation thermique, mobilité bas carbone, urbanisme
restructuré, agriculture durable) sont essentiels pour préparer l’avenir et la
IIIème Révolution Industrielle. Que faire avec une économie capitaliste qui
préfère les marchés financiers pour compenser son manque de profitabilité et
une économie collaborative sans moyen financier ? La puissance publique ne
peut se désintéresser de cette priorité, elle doit donner confiance aux
citoyens-entrepreneurs et insuffler une ambition collective en matière
d’éducation et de filières industrielles nécessaires aux transitions
énergétique et numérique. Elle doit retrouver des marges de manœuvre
financières qu’elle n’a plus (endettement public, blocage européen), quitte à
laisser filer le déficit s’il est réellement orienté vers l’investissement.
Nouvelle Donne a par exemple proposé que la dette ancienne soit remboursée par
l’intervention de la Banque Centrale Européenne qui prêterait aux Etats à taux
0.
Evitons un rapport de force entre un
système capitaliste dominateur mais sans perspective d’avenir et des citoyens
prolétarisés mais libérés de « l’AVOIR » à travers lequel bien des
tourments jailliraient. Espérons que ces forces aux intérêts divergents agiront
avec un comportement win-win. C’est la condition pour éviter un chaos comme on
n’en a jamais vu. Nous devons modifier nos comportements agressifs et
prédateurs sans quoi nous courrons à notre perte. Confiant en notre capacité à
dominer nos démons destructeurs, Jeremy Rifkin nous rappelle que « nous
entrons dans un monde partiellement au-delà des marchés, où nous apprenons à
vivre ensemble, toujours plus interdépendants, sur un communal collaboratif
mondial. » (« La nouvelle
société du coût marginal zéro » p.10)