La question souvent posée est de savoir
s’il est préférable de privilégier des zones d’emploi performantes, quitte
à en sacrifier des territoires, ou s’il
faut maintenir coûte que coûte une pseudo égalité territoriale ?
Malheureusement, on ne nous donne que le choix entre deux modèles
productivistes, capitalistes ou collectivistes, qui me semblent de plus en plus
inappropriés.
La désindustrialisation a commencé à la
fin des années 70 et se poursuit sans cesse depuis. Elle a été plus rapide en
France que dans les autres pays de l’OCDE. Le poids dans le PIB de l’industrie
française est passé de 24% en 1980 à 14% en 2007, puis à 10% en 2012 (20% en
Allemagne, 15,1% en Europe). L’industrie a perdu 1,9 million d’emplois
(externalisation comprise) sur la même période soit 36% de ses effectifs. 70 000
emplois industriels disparaissent tous les ans, sur les quatre dernières
années, la France a perdu un millier d’entreprises. Cette désindustrialisation a
été stimulée en partie par les délocalisations répondant à deux logiques :
se rapprocher des pays où la demande est forte et bénéficier de coûts de
production les plus faibles possibles. Toutefois ces délocalisations sont loin
d’être les seules responsables, l’augmentation de la productivité y tient une
part importante.
La désindustrialisation est
sauvage car elle n’a été à aucun moment planifiée, organisée pour éviter une
tragédie sociale. Qu’est devenue la planification à la Française qui avait
permis de sortir notre pays du sous-développement post Seconde Guerre
Mondiale ? C’était à l’Etat de la maintenir.
Les entreprises ont fait des
choix de court terme, sans se préoccuper de la perte de savoir-faire, de la
casse dans des familles entières ou de la balance commerciale française. Il fallait
à tout prix maintenir les marges et par conséquent les bénéfices à verser aux
actionnaires. L’Etat serait toujours là pour amortir les décisions économiques,
se disaient-elles. Aujourd’hui certaines d’entre elles commencent à regretter ces
choix malgré les coûts toujours plus élevés du travail en France, les entraves
administratives et la fiscalité. Elles envisagent de rapatrier leurs
productions car la technologie et l’automatisation finissent par coûter moins
cher que les salariés asiatiques et surtout les coûts de transport, les normes,
les réglementations.... On en voit les prémices et ils vont s’intensifier dans
les années à venir … nous allons vers une ré-industrialisation sans
emploi !
J’ai cru très longtemps que cette
désindustrialisation était sans retour, que la France allait devenir la station
balnéaire cotée de l’Europe. Je me suis trompé, et je n’ai pas été le seul, elle
peut retrouver sa place de puissance industrielle, mais pas celle des XIXème et
XXème siècles qui généraient le plein emploi, plutôt une place de choix dans le
cadre de la IIIème Révolution Industrielle. Nous sommes un pays de producteurs,
d’inventeurs et non de rentiers. Si nous
ne perdons pas de temps, cette désindustrialisation ne sera qu’un mauvais
souvenir d’une période de transition économique. L’entreprise n’est pas
l’ennemi du peuple si elle redevient le lieu de l’expérimentation, de la
création et de la valeur ajoutée.
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